Bibliothèque du milieu. Le dix-huitième siècle. Diderot, bien sûr.
J’ouvre page 79 :
XLII
Quand on a formé dans sa tête un de ces systèmes qui demandent à être vérifiés par l’expérience, il ne faut ni s’y attacher opiniâtrément, ni l’abandonner avec légèreté. On pense quelquefois de ses conjectures qu’elles sont fausses, quand on n’a pas pris les mesures convenables pour les trouver vraies. L’opiniâtreté a même ici moins d’inconvénient que l’excès opposé. À force de multiplier les essais, si l’on ne rencontre pas ce que l’on cherche, il peut arriver que l’on rencontre mieux. Jamais le temps qu’on emploie à interroger la nature n’est entièrement perdu. Il faut mesurer sa constance sur le degré de l’analogie. Les idées absolument bizarres ne méritent qu’un premier essai. Il faut accorder quelque chose de plus à celles qui ont de la vraisemblance ; et ne renoncer, que quand on est épuisé, à celles qui promettent une découverte importante. Il semble qu’on ait guère besoin de préceptes là-dessus. On s’attache naturellement aux recherches à proportion de l’intérêt qu’on y prend.

Textes choisis – De l’interprétation de la nature — Articles de l’Encyclopédie. Denis Diderot. Préface et commentaires de Jean Varloot.
Éditions Sociales. Les Classiques du peuple. 1953.
Un article sur « Pensées sur l’interprétation de la nature »