Cent livres. Nous sommes riches.

Cette idée, légère au début, s’alourdit chaque jour d’une marque. Une petite encoche qui fragilise un peu le fil des jours. Jour après jour.
Ce matin, c’est le centième livre.
Mes amis sont sensibles au nombre et au temps:
3650 pages sans compter les années bissextiles. Soit environ 36 ouvrages de 100 pages en moyenne sur 10 ans, soit 3 à 4 livres par an.
— Alors, là, c’est un sacré chantier!
— Déjà qu’avec sa propre bibliothèque, si en plus celle de sa voisine
!
Ça me plait beaucoup. Pas sûre que tu tiennes 10 ans, mais je veux bien parier.
— Comme la vie passe. Dommage, je commençais à m’y habituer…

Ou à la variété:
— Quelle merveille que cette herborisation dans tes chemins littéraires; c’est le contraire du désherbage pratiqué par les bibliothécaires, une surprise et une dégustation toujours renouvelées.
— C’est un peu comme une exposition des traces qui nous (t’)on construit(e)s, et ça ouvre plein de petites fenêtres sur l’immensité du vivant.
— J’imagine une cuillère de pâtes au sucre une fourchette de lapin aux pruneaux une lichette de pommard un morceau de gâteau au chocolat une patte de tourteau à Port-Vendres…
A la virtualité:
— Si j’ai bien compris, tu donnes tes bouquins?
— T’es tellement bouleversée de les jeter (même virtuellement) que tu en fais des fautes d’orthographe, c’est dire!
— J’aime beaucoup ton texte sur la dépossession décidée qui tient encore du partage, j’aime beaucoup ton entreprise d’écoulement littéraire et bibliophilique virtuelle.
Au croisement avec leurs préoccupations:
— Tu recopies le fragment en question? c’est dingue comme boulot! (as-tu remarqué la drôle de tête du c cédille dans ta police?)
— Je me suis déjà connectée et fais un peu de miel avec ton envoi du jour. Je reviendrai souvent sur la toile dès que ma petite fille fera la sieste!
— Je trouve ça très intéressant ton truc. Ce qui est sûr, c’est que ça donne envie de lire. Dans tous les sens.
— Super idée, je m’inscris !
— Le format est bien, court, juste le temps d’un bout de voyage et retour…à suivre.
Ou à mon délire à propos de la cohérence du hasard:
— Il est certain que les livres se causent. Imagine collés ainsi les uns aux autres, debout, couchés, dans le noir, à la lumière, dans l’humidité des caves, trop près du poêle. Oui… Maintenant, il s’agit d’écrire le livre de ce qu’ils se racontent!
— En plus, de lire tes chroniques fait la démonstration qu’il y a des lectures générationnelles. Tant de livres-frères dans ma propre bibli!
— C’est pas beau le puzzle de la vie? où kilé le scénariste?
— Le labyrinthe, comme figure d’une pensée articulée sur ses propres méandres et fascinée par elle même.

Voilà le jeu. Chacun sa pioche. Des faits inattendus se produisent : je prends par hasard et j’ouvre au hasard à plusieurs jours d’intervalle deux volumes de Hoffmann — et dans les deux le héros est dans la peau d’un chat. La veille, La Cuisinière Provençale, éditée à Marseille — le lendemain, l’exploration de Marseille par Ali Taptik. L’Armée Furieuse, de Vargas, alors que je suis en train de lire le récit de la Grande Chasse par un personnage du Moulin du Frau d’Eugène Le Roy.
Chaque livre croise une conversation, avive un événement, fait vaciller une idée trop claire…
Je continue, avide du hasard, gratuite.

Merci à Claude Baudin, Elisabeth Brami, Maïté Colin, Philippe Dessein, Stéphanie Fouquet, Joani Grandière, Françoise Ille, Jacques Laronche, Isabelle Micaleff, Martine Steinmetz, Sophie Tréguier — qui m’ont offert des commentaires pour orner l’entreprise — que j’ai pillés sans scrupule pour fêter ce centenaire;  et aux inconnus qui viennent se promener, butinent, et laissent un petit cœur rouge sur un livre.
Et merci à Jorge Luis Borges qui a écrit: prendre un livre dans une bibliothèque et le remettre, c’est fatiguer les étagères.


2 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Françoise dit :

    Beaucoup partie cet été, je n’ouvre à nouveau cette bibliothèque offerte qu’aujourd’hui… et le ravissement de ces pages quotidiennes comme un cadeau lumineux, attendu, mais cependant toujours inattendu ! Merci ! j’adore !!! je partage parfois sur facebook (page Soiz Ile)… bises. Françoise

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    1. ecridom dit :

      Je me disais, justement, ce matin, Françoise voyage!

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